Aujourd’hui, je suis né
Pour être plus précis, c'est le jour où nous sommes nés il y a 61 ans. J'ai émergé le premier, mais quelque chose clochait. On me mit en réserve. Lui s'est étouffé à mort et j'ignorerai toujours si j'y fus pour quelque chose.
Par une bien étrange coincidence, mon patronyme est lié à une autre naissance gémellaire relatée dans la Bible (chapitre 38 du Livre de la Genèse). S'étant signalé au monde le premier, Zerah aurait dû être l'aîné, on lui ceignit d'ailleurs le poignet de rouge, mais son jumeau s'expurgea intégralement avant lui, devenant ainsi l'héritier de Juda, et plus tard l'ancêtre de Jésus de Nazareth. A quoi tiennent les choses.
Chez nous, le destin se livra à un autre style de facétie. L'un (lui) a disparu, l'autre (moi) a été caché. Et c'est un autre, plus tard, qui récupéra le droit (et les devoirs) d'aînesse.
61 est un nombre premier. A la différence de l'histoire biblique des enfants de Juda et Tamar, aucun de nous deux ne lutta pour être le premier. Aucun de nous deux ne semblait vouloir l'être. En ce jour anniversaire, nous sommes premiers tous les deux. En forme de clin d’oeil commémoratif, cet ancien jeton de loto, lui aussi ceinturé de rouge, bas-relief émergeant petit à petit de son humus de bois, comme les sculptures des Jardins Statuaires de Jacques Abeille.